mardi 9 décembre 2008

ARTICLE SUR LE SPECTACLE "BUKOWSKI", IN "L'HUMANITE"



Bukowski ou l’ivresse des mots

SPECTACLE . Éric Frey se glisse dans l’univers de Bukowski avec bonheur, en compagnie de trois musiciens-complices. On en redemande.

« Dormir, mourir », dit Hamlet. Boire, baiser, fumer, dormir, mourir, telle aurait pu être la devise de Bukowski, Charles, poète, écrivain américain né en 1920, mort en 1994. Auteur culte sur le tard, vénéré pour des raisons plus anecdotiques que littéraires, son écriture témoigne d’un écrivain à la plume rageuse et poétique, insoumise et libre qui prend à contre-pied les règles de la bienséance littéraire. Une écriture noire, sans concessions, acérée et irrévérencieuse qui déroule le fil de ses obsessions - les femmes, l’alcool, la violence - loin, très loin d’une humanité standardisée, plus proche d’un bestiaire imaginé où les hommes font figure de héros déglingués. Bukowski dit « je » dans ce jeu de miroir infini qu’il nous tend sous le nez et dans lequel chacun de nous peut se reconnaître. Une lucidité éveillée, une empathie qui ne dit pas son nom avec lui-même et son prochain, une distance salutaire qui lui permet de rire de tout, et surtout de lui-même.

C’est à partir de ses correspondances qu’Éric Frey, acteur formé au Conservatoire dans les classes de Vitez et de Bouquet, a mis en espace et en musique Bukowski Quatuor ou jouer du piano ivre, un spectacle qu’il a créé voilà six ans et qu’il joue, de-ci, de-là, dans des endroits improbables, devant un comptoir, dans l’arrière-salle d’une boutique, ou encore dans le sous-sol d’un pub. Il suffit que les emplois du temps des uns et des autres leur permettent de se retrouver pour dire, lire, feuilleter du
Bukowski, autour d’une bière, cela va de soi.

Un quatuor né au fil des rencontres et qui réunit, autour d’Éric Frey, trois musiciens incroyablement doués : Aurélien Richard au piano, Tommaso Montagnani à la contrebasse et Sorriso à la batterie. Tout est là : les mots acérés, le regard brouillé, les chambres minables dans des hôtels encore plus minables, les rencontres du petit matin, les filles, le jazz… Et c’est subtil, et c’est drôle. L’ombre de Bukowski plane, nous enveloppe et, dans ce défilé d’une nature humaine hétéroclite, passe celle d’un Art Pepper, d’un Archie Shepp, d’un Rimbaud aussi. Entre Frey qui prend un malin plaisir à nous faire entendre un Bukowski pétillant loin de la facilité fumeuse, toujours sensible, et le talent de ses musiciens, non seulement on est séduit mais les mots de l’écrivain résonnent en cette période étrange où l’interdit, l’autocensure, la morale voudraient dominer le monde.

Ça joue à contretemps, ça dit des mots que nos gardiens de la morale bipent à chaque instant, ça dit la vie, l’amour, le plaisir de boire et de s’en griller une, le plaisir d’aimer et la solitude comme un instant suspendu et nécessaire pour vivre. Et ces mots nous collent à la peau, ne nous lâchent plus, nous aident à poursuivre notre route, un peu moins seuls, puisqu’ils sont là, à éveiller nos consciences engourdies.

Ce spectacle se joue de manière imprévue. Il s’est joué au Bab-Ilo, 9, rue du Baigneur, Paris (18e). Prochaine session : mars 2009. On vous préviendra.

Marie-José SIRACH, in "L'Humanité", 08 décembre 08

jeudi 6 novembre 2008

ARTICLE SUR AURELIEN RICHARD, IN "DANSER"


Bonnes notes

Musicien pour la danse, Aurélien Richard a collaboré avec des chorégraphes comme David Wampach ou son propre frère Alban, avec Forsythe et Kylian à l’Opéra de Paris et avec Maurice Béjart. Il est aussi directeur artistique d’un collectif d’artistes, les Désinents.

Non, Aurélien Richard ne vient pas d’entrer dans la danse. Repéré récemment au côté de David Wampach dans Auto, habitant l’espace avec son piano à l’instar des performances de Joseph Beuys. Il n’est pas non plus parachuté par son frère Alban, avec lequel il a certes collaboré sur Blood Roses, Häftling, A tribute to B. Né à Brest, il ressent le désir de piano dès qu’il sait parler. « J’étais programmé pour la virtuosité, j’étais un bouffeur de partitions ». Dès la quatrième, c’est une vie de solitude : le CNED, les conservatoires, puis, dès quatorze ans, les concerts et même un poste de professeur d’accompagnement à l’ENM du Havre !
Cet adolescent vit éloigné du rock de ses congénères, se nourrit de Messiaen, de Poulenc, de Berg, et réduit dans sa chambre des partitions d’orchestre pour piano. Le choc, c’est-à-dire ce qui va le sortir de sa tour d’ivoire, c’est le premier contrat d’Alban avec Karine Saporta, c’est le Spectre en 1995 au Théâtre de la Ville. Chopin, le romantisme, mais aussi et surtout la grâce de la danse.

Trois ans plus tard, il quitte le Havre pour Paris et passe une audition pour être chef de chant à la section danse de l’Opéra. IL est pris, Brigitte Lefèvre l’oriente alors, en tant que sang neuf, vers les créations contemporaines. « C’est ainsi que j’ai travaillé avec Forsythe sur In the Middle…, Pas/parts, Wound Work ; Kylian ensuite, pour Doux mensonges avec William Christie, j’ai coaché danseurs et musiciens dans la même musicalité du corps. » C’est que pour Aurélien, « un corps qui vit et qui chante, c’est une vibration dans l’espace. » Ainsi, pour lui, la dérive d’un musicien qui donne un récital, le risque permanent, c’est de ne pas être touché par les différences corporellement parlant. Car Beethoven exulte le corps, Bach est plus psychique par exemple. Un pianiste doit être sensible aux énergies.

Par rapport à la danse, un musicien ou un DJ doit se poser la question de sa légitimité sur le plateau, et songer à projeter dans l’espace sonore son corps d’interprète. La danse procure à Aurélien un rythme de travail qui lui convient, « entre solitude et plateau, je navigue ». En effet, un musicien sans la danse vit « un sacerdoce avec son instrument ». La danse lui permet de s’ouvrir aux autres, sans jamais composer avant d’avoir capté le mouvement, rencontré les danseurs. « Je me plie à mon corps donc je me plie aux corps des autres. Tout doit s’imbriquer ; il est vrai que dans mon travail sur la Neuvième Symphonie avec Béjart, c’était a priori, différent de ma fonction de metteur en scène avec mon ensemble les Désinents. Mais même là, j’ai entendu donner des clefs de compréhension de la musique aux danseurs ». Il voit en effet la musique comme un élément de la danse, quitte à faire chanter les danseurs comme dans Häftling. Ou quitte à évoluer lui-même avec ses compétences de pianiste, de compositeur, de metteur en scène, réquisitionnées toutes par David Wampach dans Auto. « Cette pièce peut encore changer, tout s’y est élaboré pendant le processus de création. Cela étant, ce lâcher prise n’est pas un laisser aller. David ne parle pas de lui en tant qu’individu, mais à travers le prisme de quelque chose d’universel et de construit. Avec Raphaëlle Delaunay avec qui je vais collaborer, l’enjeu sera de dépasser la virtuosité pour laquelle nous étions tous deux programmés, mais sans outrance. »

Oui, Aurélien tient à la partition. Elle a beau changer parfois tous les jours en atelier, elle constitue le nœud du challenge. Ainsi, à l’instar de la colombe de Kant qui est d’autant plus libre qu’elle obéit à des lois, la contrainte est pour ce musicien qui danse le prix de la liberté.

Bérengère ALFORT in Danser, novembre 2008

lundi 22 septembre 2008

SAISON 08-09


En ce début de saison, quelques mots sur les projets des Désinents pour la saison 2008-2009 :

· Création au printemps 2009 de " Hoketus" , duo avec Mickaël PHELIPPEAU et Aurélien RICHARD

· Préparation de " (Art de la Fugue) > dérivations " , pièce musicale, chorégraphique et lumineuse conçue autour de L'Art de la Fugue de Bach

· Enfin, les Désinents poursuivront la série des "Concerts commentés" ainsi que les actions en milieu scolaire et universitaire ...

Par ailleurs, Aurélien RICHARD, directeur artistique de l'ensemble Les Désinents, développe d'autres projets en tant que pianiste, compositeur et interprète chorégraphique.

www.myspace.com/aurlienrichard

lundi 30 juin 2008

INTERVIEW DE FIN DE RESIDENCE


" ON A REMPLI NOTRE MISSION "


- Etre en résidence pendant trois ans et demi, n'est-ce pas du luxe ?

- C'est un luxe parce qu'on nous a donné des moyens pour défendre des projets. Mais nos subventions ont fondu au fil des trois ans. De 35 000 euros la première année, on est passé à 25 000 puis à 20 000 euros la troisième année. On a été obligé de revoir nos ambitions à la baisse, sachant que l'on a tout de même monté pendant ces trois ans au moins une prestation par mois à Gisors... Mais on ne crache pas dans la soupe. Il faut souligner le courage énorme de Marcel Larmanou. C'était très difficile à l'époque d'imaginer, pour les élus, ce que serait une résidence d'artistes. Gisors a très peu de lieux. Nous, on arrivait avec des exigences matérielles, notamment pour répéter.

- Au procès d'élitisme que certains élus vous ont fait, que répondez-vous aujourd'hui ?

- Pour moi, c'est un faux débat. Sur la totalité de la résidence, on a fait des choses : 150 personnes lors de la soirée danse contemporaine / cinéma. 600 personnes aux Journée du Patrimoine 2007. 150 lycéens venus jeudi dernier venus applaudir leurs camarades... Une résidence telle que la nôtre ne peut pas fonctionner en terme de chiffres. L'art contemporain est une frange. Il amène moins de public, c'est inscrit. On était de plus dans une addition par rapport à la Saison Culturelle. On a rempli notre mission. Par contre, nous n'avons pas été défendus au niveau de la communication de la Ville. Aller coller des affiches, ce n'est pas mon rôle. La ville a sa responsabilité dans le déficit de communication, non seulement pour nous, mais pour tous les spectacles de la saison culturelle.

- Quels sont vos projets désormais ?

- A un moment donné, il faut qu'une ville défende d'autres artistes. La diversité artistique est importante. On travaille à un gros projet de résidence pour 2009 à Metz. Pour nous, c'est un enjeu énorme. Cela confirmera que les Désinents sont présents sur la scène contemporaine européenne. D'autres propositions nous attendent... Un accueil sera peut-être possible à Gisors : nous reviendrons !

L.A., in l'Impartial

mardi 10 juin 2008

FIN DE SAISON ET FIN DE LA RESIDENCE A GISORS


chers tous,

après une saison bien remplie par les différents projets gisorsiens et la création de l'opéra pluridisciplinaire "Medeamaterial" autour du fameux texte de Heiner MÜLLER, les Désinents prennent une pause avant d'entamer la rentrée de septembre.

Aurélien RICHARD, directeur artistique de l'ensemble, a décidé de laisser un peu reposer l'équipe pour permettre l'élaboration des nouveaux projets 2009-2010. En effet, après pas moins de quatre ans de résidence à Gisors, avec le plus souvent un projet nouveau par mois, les Désinents ont maintenant choisi de re-questionner leurs modes de production, leur représentativité, leur réactivité, leurs enjeux artistiques face à un marché du spectacle vivant de plus en plus saturé et par là-même et paradoxalement, de plus en plus précaire.

Longtemps seul à décider des projets et de la manière de les mener à bien, Aurélien souhaite désormais travailler avec une équipe de collaborateurs forte, ambitieuse comme l'a toujours été l'ensemble, afin aussi de réfléchir et de re-définir la notion de groupe de travail, de pensée. Il souhaite ne pas isoler les différents projets mais plutôt, en réunissant à chaque fois toute l'équipe, concerner tous ceux qui pourraient être force de proposition dans chacun d'eux et leur apporter un éclairage particulier.
Il ne s'agit pas non plus à proprement parler d'un fonctionnement en collectif, Aurélien restant directeur artistique.

Il est question ici d'enrichir la réflexion, d'encourager à produire, d'ouvrir un espace à une communauté d'esprits afin d'écrire une matière sensible et singulière pour le plateau.

Pour ce faire, Aurélien RICHARD propose à Christine CARADEC, Caty OLIVE, Thierry GRAPOTTE et Frédéric PEROUCHINE de travailler avec lui sur les différents projets que voici :

- "L'Art de la Fugue > dérivations", pièce chorégraphique et musicale pour un pianiste et un créateur lumière autour de l'oeuvre de Johann Sebastian BACH

- "Introspection(s)", atelier pédagogique sur l'acteur pour une vingtaine de lycéens à partir d'un texte de Peter HANDKE

- "snow whirled / nothing ever fell", solo de danse pour Mickaël PHELIPPEAU avec musicien

- "les concerts commentés", cycle regroupant différents programmes musicaux, en solo, duo ou ensemble

Ces projets ne sont pas les "créations 2009 ou 2010" de l'ensemble, ils sont chacun comme une mise à l'épreuve, un questionnement, une occasion pour se jouer du formatage (tant présent sur nos plateaux) des propositions scéniques actuelles et une façon d'exposer nos envies d'artistes, si dépendantes de nos manières de sentir, de voir, d'écouter, de faire, de défaire, de construire...

... une manière de (sur)vivre.

dimanche 13 avril 2008

CONCERT COMMENTE DU 8 JUIN : PROGRAMME


8 juin , Eglise de Gisors , 16 h
CONCERT COMMENTE
Aurélien RICHARD, pianiste et analyste
Félix PERDREAU, traitement sonore

Archipel 4 d'André BOUCOURECHLIEV

Sonate opus 110 en la bémol majeur de Ludwig van BEETHOVEN

Etudes pour piano d'Aurélien RICHARD (première audition) : Around and About / Taking a Line for 7 minute Walk and Disappearing / Self Shots

Ce concert sera dédié à la mémoire de Rolande BADIER, récemment disparue.

CONCERT-CONFERENCE DU 16 MAI : PROGRAMME


16 mai, Eglise de CHAUMONT-EN-VEXIN, 20h30
Concert-conférence autour de Gérard de Nerval et Franz Liszt
"Dialogue des âmes ardentes"
Emmanuel GODO, conférencier et Aurélien RICHARD, pianiste

"Prélude et fugue en la mineur de Bach" transcrit par Franz LISZT
"La Mort d'Yseult de Wagner" transcrit par Franz LISZT
"La Lugubre Gondole n° 1 et n° 2", "Hymne de l'enfant à son réveil" et "Funérailles" de Franz LISZT

dimanche 30 mars 2008

ADIEU

Nous voulions vous faire part du décès de Rolande BADIER, survenu il y a quelques jours. Elle était déjà malade depuis longtemps, mais nous sommes très peinés de sa disparition. Blessée pendant la Seconde Guerre, elle était une très grande pédagogue et nous a fait le plaisir d'accepter, il y a quelques années, de jouer en tant que comédienne dans nos spectacles "Different sections" autour de trois pièces de Steve REICH et "Perform.time 2". Elle était toujours au rendez-vous pour nous donner ses impressions sur les créations et concerts donnés par les Désinents. Elle nous manque déjà...

samedi 15 mars 2008

QUELQUES DATES A RETENIR


chers tous,

juste pour vous inciter à venir nous entendre dans le spectacle "Dialogue des âmes ardentes", conçu autour des textes de Gérard de Nerval et de pièces de Ludwig van Beethoven et Franz Liszt, avec Emmanuel GODO, conférencier, et Aurélien RICHARD, pianiste, le vendredi 16 mai à 20h30 en l'Eglise de Chaumont-en-Vexin.
La résidence des Désinents à Gisors se terminera cette saison par un concert commenté très intéressant sur les structures rhizomatiques de la pensée musicale chez Beethoven et Boucourechliev, dans le cadre extraordinaire de l'Eglise Saint-Gervais/Saint-Protais de Gisors, avec Aurélien RICHARD, analyste et pianiste, le dimanche 8 juin à 16h.
Au plaisir de vous retrouver lors de ces performances,